Pathologies de l'Epaule





Nous détaillerons deux des pathologies les plus fréquentes qui sont :
- la tendinite et perforation de la coiffe des rotateurs ;
- la luxation aiguë et récidivante de l’épaule.

1- LA TENDINITE ET PERFORATION
DE LA COIFFE DES ROTATEURS

Cette pathologie est extrêmement fréquente, elle est aussi appelée périarthrite scapulohumérale.
Elle touche plus la femme que l’homme et survient en deuxième partie de vie vers la cinquantaine.
La lésion de base est la tendinite, c’est à dire l’usure et l’inflammation chronique du tendon.
Le tendon le plus féquemment touché et souvent le premier est le sus-épineux.
La cause de la tendinite est souvent double, d’une part l’usure naturelle et inexorable des tissus, d’autre part une cause mécanique, le conflit sous-acromial.
Comme nous l’avons vu plus haut, la coiffe des rotateurs se trouve entre la tête humérale et l’acromion de l’omoplate. Lorsque celui-ci est agressif ou en crochet, il provoque un frottement permanent sur les tendons, surtout dans les mouvements d’abduction de l’épaule. Ce frottement entraine d’abord un oedême des tendons qui par leur augmentation de volume aggrave le frottement, créant ainsi un cercle vicieux.
La tendinite chronique entraine des lésions irréversibles du tendon pouvant aller jusqu’à la perforation transfixiante. Il s’agit donc de lésions dégénératives.
Cette maladie touche principalement et en premier le sus-épineux puis s’étend vers le sous- épineux en arrière et le sous-scapulaire en avant.
Au terme de l’évolution de cette pathologie, si rien est fait, il se produit une « digestion » progressive des tendons qui disparaissent peu à peu jusqu’à exposer complètement la tête humérale réalisant la classique « tête chauve ».
Chirurgicalement, cette disparition progressive de la matière tendineuse peut créer un réel problème pour la réparation.

SYMPTOMES ET EXAMEN CLINIQUE

Comme souvent dans les pathologies de l’appareil locomoteur, la douleur est le premier signe qui fait découvrir cette maladie. Cette douleur apparaît pour les mouvements d’abduction de l’épaule et devient rapidement gênante pour les tâches quotidiennes au domicile.
La douleur est présente sur une partie du mouvement réalisant un arc douloureux.
Après quelques mois d’évolution, cette douleur peut devenir permanente et nocturne.
La limitation de l’amplitude d’abduction est également présente quand la pathologie est installée depuis longtemps.
Parfois le patient peut ressentir des craquements lors des mouvements.

L’examen clinique est très précis. Il recherche d’abord le siège de la douleur qui souvent antérieure juste sous l’acromion, siège du sus-épineux.
Ensuite on apprécie la mobilité active du patient en abduction, en antépulsion, en rotation externe et en rotation interne.
Le patient atteint de simple tendinite a souvent une mobilité active conservée mais décrit un arc douloureux entre 30 et 90°.
L’examinateur recherchera un point douloureux à la pression sur le sus-épineux en sous- acromial.
Il existe plusieurs mouvements tests en abduction contrariée ou en rotation contrariée qui, lorsqu’ils sont positifs, orientent sur le ou les tendons touchés.

L’examen regarde aussi une éventuelle amyotrophie des muscles sus et sous-épineux en arrière de l’omoplate et plus rarement du deltoïde. Les craquements sous-acromiaux sont parfois perceptibles à l’abduction active.

IMAGERIE

La radiographie standard est un bon examen et recherchera :

- des éventuelles calcifications intratendineuses à proximité du trochiter de l’humérus.
Ces calcifications sont d’environ 5 à 10 mm et arrondies ou ovalaires. Elles témoigent de la
souffrance chronique du tendon qui secrète une sorte de « bouillie calcique » en son sein.
- un acromion agressif crochu qui est souvent à l’origine du conflit sous acromial ;
- une diminution de l’espace sous-acromial qui témoigne de la perte de substance tendineuse
et souvent d’une rupture déjà importante de la coiffe des rotateurs.

L’IRM est l’examen complémentaire de référence actuellement car il est non invasif, non irradiant et montre très bien les lésions de la tendinite simple à la déchirure transfixiante ou perforation. Elle peut mesurer la taille du trou en mm avec une assez grande précision.
Elle apprécie également la trophicité des muscles de la coiffe avec, en fin d’évolution, une dégénérescence graisseuse des corps musculaires.

L’arthroscanner était très utilisé avant l’ère de l’IRM mais nécessite une injection intra- articulaire d’un produit de contraste qui peut parfois entrainer une réaction allergique chez quelques patients. De plus, c’est un examen irradiant.
Il montre assez bien les perforations de la coiffe en visualisant une fuite du produit de contraste de l’articulation vers la bourse séreuse sous-acromio-deltoîdienne.

   
 
 


L’arthroscopie d’épaule est le meilleur examen pour visualiser la coiffe des rotateurs par dessus (dans la bourse séreuse) et par dessous (dans l’articulation) mais ne doit en aucun cas être un examen de diagnostic mais uniquement un moyen thérapeutique.

TRAITEMENT

Le traitement de la pathologie dégénérative de la coiffe des rotateurs est multiple :

- médical, grâce à la prescription d’antalgiques et d’anti-inflammatoires ;

- les infiltrations sous-acromiales de corticoïdes locaux à action prolongée (ALTIM) sont très efficaces dans cette pathologie ;

- la rééducation aussi est une possibilité thérapeutique avant la chirurgie. Elle aura pour but de diminuer la douleur grâce à des techniques antalgiques comme le massage transverse profond, la cryothérapie, la ionisation, etc. Elle s’efforcera de récupérer une mobilité active et remuscler le deltoïde ;

- chirurgical enfin lorsque toutes les solutions médicales ont été utilisées dans les formes peu évoluées de tendinite du sus ou sous-épineux non transfixiantes ; dans tous les cas lorsque la perforation tendineuse dépasse 1cm.
Nous détaillerons plus loin les techniques chirurgicales qui peuvent être à ciel ouvert par mini-abord ou par arthroscopie.
 

2 - LA LUXATION AIGUË
ET RECIDIVENTE DE L'EPAULE


LA LUXATION AIGUË TRAUMATIQUE

La luxation traumatique antéro-interne de la tête humérale survient le plus souvent après un accident assez violent indirect de l’épaule.
La luxation signifie que la tête de l’humérus est sortie de son emplacement en face de la glène et se retrouve devant l’articulation et en position inférieure.
Les patients sont souvent jeunes et plutôt de sexe masculin.
Avant d’être récidivante, il y a toujours un premier accident aigu.
Le premier accident est le plus souvent une chute avec réception sur la main, bras tendu et épaule en arrière.
Le patient ressent immédiatement une douleur intense de son épaule avec une impotence fonctionnelle totale de son membre supérieur. Aucun mouvement actif de l’épaule n’est possible sans déclencher une très vive douleur.
Le patient blessé est amené généralement aux urgences où une radiographie est pratiquée rapidement et montre la tête humérale hors de son emplacement habituel.
L’examen clinique est très important aussi pour le diagnostic. Il recherche le signe essentiel de luxation : le vide sous-acromial. Lorsqu’on appuie avec le pouce sous l’acromion en avant de l’épaule, on ne perçoit plus la tête de l’humérus mais un creux.
On recherche également le signe de l’épaulette c’est à dire un aspect carré du moignon de l’épaule et non arrondi.
Enfin, l’examen clinique initial doit apprécier l’état du nerf circonflexe qui peut rarement être atteint lors du traumatisme. Pour des raisons médico-légales, il faut absolument connaître l’état de ce nerf avant la réduction de la luxation et, en cas d’atteinte, bien en informer le patient avant toute manipulation pour ne pas que ce dernier impute la lésion au médecin.
Une fois le diagnostic de luxation antérieure de l’épaule fait, il faut rapidement soulager le patient en remettant en place son articulation.
La réduction peut se faire aux urgences sans anesthésie générale à condition que l’accident ait moins de 6 h, que le patient soit suffisamment relâché musculairement et que le médecin ait l’habitude de pratiquer ce geste.
Pour le relâchement musculaire, une injection de valium en intramusculaire 15 mn avant peut aider.
Les techniques de réduction sont nombreuses mais le geste doit associer traction, abduction et rotation externe en douceur mais continuellement jusqu’à obtenir le ressaut caractéristique de la réintégration de la tête humérale dans sa glène. On peut s’aider d’un contre appui dans l’aisselle du patient par exemple, un dossier de chaise en position assise ou une écharpe en bandoulière en position couchée.
Une fois la réduction obtenue, le patient se sent immédiatement soulagé de sa douleur et peut même bouger son bras seul.
Le nerf circonflexe doit obligatoirement être testé de nouveau.
Le patient est immobilisé coude au corps par un gilet spécial pour une durée de 3 semaines.

Une radio de contrôle est faite après la réduction pour s‘assurer de la bonne position de la tête humérale avec un retour à l’anatomie normale de l’épaule.
Après les trois semaines d’immobilisation de l’épaule, celle-ci doit être rééduquée chez un kiné pendant 15 séances avant de pouvoir recommencer toute activité sportive.


Luxation aiguë de l'épaule

LA LUXATION RECIDIVENTE

Après une première luxation de l’épaule et malgré un traitement correct associant immobilisation puis rééducation, le risque de récidive est très fréquent.
Les statistiques montrent que le risque augmente considérablement en fonction de l’âge et du sexe du patient.
En gros, un jeune garçon de 18 ans a quasiment 95% de risque d’avoir une deuxième luxation et par conséquent, une multitude d’autres épisodes d’instabilité de son épaule.
Les luxations vont se répéter pour des accidents de moins en moins violents jusqu’à apparaître pour des mouvements de la vie quotidienne.
Ces mouvements sont toujours en abduction et rotation externe. Tous les mouvements d’armer peuvent alors déclencher une instabilité ou une luxation vraie.
A partir de la deuxième luxation, on peut parler de luxation récidivente.
Les patients tolèrent plus ou moins bien cette instabilité et certains consultent dès la deuxième alors que d’autres attendent la dixième.
Parfois le patient n’a subi qu’une seule vraie luxation diagnostiquée et traitée.
Certains patients ne décrivent qu’une instabilité ressentie sans luxation vraie. Dans ce cas, la gène est fréquente pour les mouvements d’abduction et rotation externe avec sensation de ressaut dans l’épaule.
Parfois le patient consulte pour douleur et instabilité.
Le diagnostic de luxation récidivente de l’épaule est assez simple lorsque le patient peut prouver radiologiquement la multiplicité des luxations.
Par contre, lorsqu’il n’y a aucune preuve radiologique de luxation, le diagnostic repose sur l’examen clinique et les examens complémentaires.
L’examen clinique regarde d’abord une éventuelle amyotrophie du deltoïde. La mobilité passive et active est évaluée. La sensibilité du moignon de l’épaule apprécie l’état du nerf circonflexe.
Le test de l’appréhension est très important, il déclenche une sensation de luxation imminente lorsqu’on met le bras du patient à 90° d’abduction et en rotation externe maximale en position couché. Le « relocation test » permet de faire disparaître cette sensation désagréable en poussant vers l’arrière le bras du patient.
L’examen recherchera également une distension capsulaire inférieure en tractant vers le bas les deux bras du patient et en recherchant une différence d’amplitude un peu comme pour le tiroir du genou.
La radiographie recherchera les signes satellites d’une luxation ancienne comme l’encoche de malgaigne ou l’avulsion du bord inférieur de la glène.
L’arthroscanner est l’examen de référence, il montre des stigmates de luxations comme une lésion du bourrelet glénoïdien antérieur ou une distension capsulaire antérieure : la poche de BROCCA.
Quand le diagnostic de luxation récidivente de l’épaule ou d’instabilité chronique antérieure est posé, le temps du traitement chirurgical est venu.