Les Pathologies courantes de la Main





1 - RHIZARTHROSE

La rhizarthrose est l’atteinte arthrosique de la racine du pouce, c’est à dire de l’articulation entre le trapèze et le premier métacarpien. Cette articulation est en double selle (une sur le trapèze et une sur la base de M). Cette articulation est fermée par une capsule articulaire dont les renforts constituent les ligaments.
Cette articulation permet des mouvements dans 3 plans, flexion, extension, antépulsion et rétropulsion et également rotation.

En fait cette articulation permet d’orienter la pulpe du pouce en opposition aux autres doigts pour les mouvements fins de préhension. Cette articulation est sollicitée de façon très importante pour tous les mouvements de pince entre le pouce et les autres doigts et en particulier la pince pouce index.

CLINIQUE

La rhizarthrose est très fréquente et souvent bien tolérée. Elle atteint plus souvent la femme, après cinquante ans et elle est volontiers bilatérale. Le plus souvent l’arthrose est primitive c’est à dire sans aucune cause retrouvée. Elle apparaît après des mouvements répétitifs qui comme on l’a vu exercent des pressions considérables sur cette petite articulation. Elle est rarement secondaire à une fracture articulaire ou à une luxation.

Certaines maladies inflammatoires comme la polyarthrite rhumatoïde peuvent entraîner une rizarthrose.

Symptomes :

La douleur est le plus souvent le premier symptôme soit spontanée soit dans certains gestes de la vie quotidienne utilisant la pince comme tourner une clef, bricoler, peler des fruits ou ouvrir un bocal.

Ensuite vont apparaître des déformations avec subluxation ou déplacement de la base du premier métacarpien. L’évolution va se poursuivre par une fermeture de la première commissure (espace entre pouce et index) qui sera ensuite compensée par une déformation de la colonne du pouce en Z avec une inversion de l’aspect normal de la MP.

Le diagnostic se fait sur des radiographies standard avec des incidences centrées qui permettent de bien visualiser cette articulation de face et de profil.

TRAITEMENT

Le traitement est d’abord et avant tout médical. Il permet dans environ 70 à 80% des cas de diminuer la douleur d’éviter les déformations et de maintenir une activité pendant plusieurs années. Les antalgiques et anti-inflammatoires sont prescris ainsi qu’une orthèse de repos c’est à dire une attelle faite sur mesure en thermoformé à porter la nuit et éventuellement la journée. On peut y associer des infiltrations de corticoïdes locaux ou encore des anti-inflammatoires par mesothérapie.

Lorsque le traitement médical suffisamment prolongé (6 mois) devient insuffisant pour calmer les douleurs, ou qu’apparaît une fermeture de la première commissure ou une déformation de la colonne du pouce, on peut envisager un traitement chirurgical.

2 - CANAL CARPIEN

Le canal carpien est un défilé anatomique normal présent chez chaque individu. Il s’agit d’un canal aux dimensions fixes, limité en arrière par les os du carpe (petits os du poignet) et en avant par un ligament appelé rétinaculum des fléchisseurs ou ligament annulaire antérieur du carpe, tendu entre les os du carpe. Dans cet espace, aux dimensions fixes chemine 9 tendons fléchisseurs (2 pour chaque doigt long et un seul pour le pouce) et un nerf volumineux, le nerf médian.

Le syndrome du canal carpien est dû à une inadéquation entre le contenant (le canal) et le contenu (tendons et nerfs) le plus souvent après augmentation du volume de la gaine des fléchisseurs. Lorsque le nerf se retrouve à l’étroit, il est comprimé, il souffre et cela se traduit d’abord par des paresthésies c’est à dire des « fourmis dans les doigts «. Le nerf médian est à la fois sensitif et moteur, il est responsable de la sensibilité des 3 premiers doigts et de la moitié externe du quatrième doigt. Il commande également la motricité du pouce en innervant la plupart des muscles thénariens externes.

 

SYMPTOMES CLINIQUES

Le syndrome du canal carpien atteint plus souvent la femme, il est volontiers bilatéral. Certains gestes répétitifs peuvent entraîner une synovite mécanique, et cette augmentation du volume des tendons comprime le nerf médian. Certaines synovites peuvent entrer dans le cadre de maladies professionnelles.
Les symptômes les plus fréquents sont les paresthésies ou picotements et engourdissements des doigts dans le territoire du nerf médian, survenant la nuit, empêchant le sommeil ou réveillant le patient. Les douleurs peuvent être localisées à la main ou ascendantes parfois jusqu’à l’épaule en passant par l’avant bras. La recrudescence nocturne est due à la baisse normale de la pression artérielle pendant le sommeil, alors le nerf comprimé réagit à la diminution de la vascularisation par une accentuation des symptômes. En se levant et en secouant la main on rétablit une meilleur pression artérielle et une meilleure vascularisation du nerf.

Les symptômes sont parfois des doigts gourds, une sensation de doigts enflés, des décharges électriques, ou une diminution de la sensibilité dans le territoire du médian. A un stade plus avancé, les «fourmis» peuvent apparaître dans la journée ou devenir permanentes.

L’évolution conduit à une maladresse dans les gestes fins (prendre des petites pièces de monnaie, faire des travaux d’aiguille, fermer les tous petits boutons...) voire des lâchage d’objets (chute de bols, tasses...) c’est la perte de préhension.

L’examen clinique recherche une amyotrophie thénarienne externe (diminution du volume des muscles de la base du pouce), une diminution de la force du pouce(opposition), une diminution de la sensibilité (hypoesthésie) voire une anesthésie des 4 premiers doigts. Les différents test cliniques (test de Phalen, et Pseudo Tinnel) confirment le diagnostic. La compression prolongée du canal carpien entraine les paresthésies et la percussion entraine des décharges électriques dans les doigts On recherche l’association à un doigt à ressaut (doigt qui se bloque ou qui saute)très fréquemment associé. On recherche également l’association à d’autres compressions canalaires (Nerf cubital au coude ou au poignet, nerf radial au coude…)

Le diagnostic est clinique. Les examens complémentaires comprennent des radiographies et un électromyogramme (EMG).
C’est l’étude de la conduction électrique des nerfs. Il se fait avec un appareillage spécial utilisant des électrodes qui envoient des petites décharges électriques indolores et qui mesure la vitesse de conduction du nerf étudié. En cas de syndrome du canal carpien, la vitesse de conduction sensitive et parfois motrice est diminuée de façon significative. L’EMG va bien sûr confirmer le niveau de la compression nerveuse, et surtout permettre d’en connaître la sévérité et l’éventuelle atteinte motrice associée non détectable à l’examen clinique
Il permet d’avoir une idée précise des délais de récupération après un traitement chirurgical. L’EMG doit être fait par un neurologue ou un rhumatologue expérimenté.
Il arrive parfois que l’EMG ne retrouve pas électriquement le canal carpien mais que les symptômes décrits par le patient sont suffisamment évocateurs du diagnostic.

La radiographie du poignet n’est pas systématique et n’a un intérêt que lorsqu’il existe des séquelles de fracture expliquant la compression du nerf médian.

CAUSES

Le plus souvent aucune cause n’est retrouvée, et le syndrome est dit primitif ou idiopathique.

Lorsqu’une cause est retrouvée on parle de syndrome du canal carpien secondaire. Parfois il est secondaire ou associé à un diabète, une hypothyroïdie ou une hypertrophie de la gaine synoviale des tendons fléchisseurs dans le cadre d’une maladie rhumatoïde.

Certains traumatismes peuvent occasionner des compressions du nerf médian comme les fractures du radius au stade de séquelles avec déformation de l’epiphyse radiale (cal vicieux).

Un cas particulier est le canal carpien de la grossesse. Il est favorisé par l’imprégnation hormonale, et son traitement est presque toujours médical. Il régresse le plus souvent après l’accouchement. Si cette compression existait avant la grossesse ou qu’elle persiste 6 mois après l’accouchement son traitement est alors différent.

TRAITEMENT

Le traitement médical est surtout utile en début d’évolution et lorsque le canal est régressif (grossesse), il est basé sur la port d’une attelle de repos la nuit et ou sur une ou plusieurs infiltrations de corticoïdes locaux à action retardée.

Ce traitement médical ne règle pas le problème qui est que le contenant (le canal) est devenu trop petit pour le contenu (les tendons fléchisseurs et le nerf médian). De plus un apparent soulagement des symptômes peut laisser évoluer une compression sévère vers des troubles en particuliers moteurs irréversibles (Paralysie de l’opposition du pouce).

Le traitement chirurgical est le traitement de choix pour assurer une guérison définitive.
Il sera détaillé dans le chapitre chirurgie de la main.

 
3 - LE DOIGT A RESSAUT

Le doigt à ressaut est aussi une pathologie fréquente de la main. Elle est liée à un blocage d’un tendon fléchisseur au niveau de la première poulie de réflexion métacarpienne la poulie A1.

Cela commence par une gêne douloureuse au niveau de la paume lors des mouvements de flexion et d’extension d’un doigt, en règle générale plus importante le matin au réveil.

Tout le monde peut présenter un doigt à ressaut même les bébés, mais ce sont les femmes d’âge moyen qui sont le plus souvent atteintes. Le diabète est un facteur de risque de doigt à ressaut.

Il se produit le plus souvent au niveau du pouce mais tous les doigts peuvent être touchés.
Pour comprendre l’origine du doigt à ressaut il faut connaître la disposition anatomique des tendons fléchisseurs au niveau des doigts et de la main. Ces tendons font suite au corps musculaire situé à l’avant-bras. Ils traversent la paume et se terminent à l’extrémité des doigts. Lorsque vous pliez les doigts ces tendons ne prennent pas la corde : ils sont plaqués contre les phalanges par des «poulies de réflexion», c’est à dire des petits tunnels, analogues au câble de frein d’un vélo qui parcourent le cadre. Ce système de tendon et de poulies est extrêmement ajusté et il suffit d’un petit épaississement du tendon même très localisé pour entraîner un blocage. C’est ce qui se produit lors du doigt à ressaut : le tendon s’épaissit localement et peut former un nodule qui a du mal à passer sous la poulie qui se trouve dans la paume de la main.

L’épaississement du tendon se produit le plus souvent sans cause précise. Parfois il semble y avoir une relation avec un geste manuel répétitif mais ce n’est pas toujours le cas, ex : taillage de haie, découpage répétitif. Le plus souvent il s’agit d’une inflammation chronique qui établit un cercle vicieux : le frottement du tendon aggrave l’inflammation, qui épaissit le tendon, augmentant le frottement.

SYMPTÔMES

Les symptômes sont soit la douleur spontanée ou à la pression de la poulie A1. le patient ressent une douleur sourde de la main augmentée à la flexion du doigt concerné.
L’étape suivante est celle du blocage en flexion du doigt, d’abord réversible mais après plusieurs mois ce blocage peut être permanent.
Le ressaut est ressenti lors de l’extension du doigt bloqué.

TECHNIQUE CHIRURGICALE

Plusieurs traitements sont possibles :

Le repos : pour les cas bénins et lorsque cela est possible, la mise au repos du doigt peut suffire à faire disparaître les symptômes. Le repos consiste a éviter les travaux manuels et répétitifs.

L’infiltration : elle consiste à injecter localement un produit corticoïde type Altim®. Il s’agit d’un médicament anti-inflammatoire dont l’effet est d’atténuer l’inflammation locale, et donc de faire dégonfler l’épaississement tendineux. . L’infiltration est douloureuse environ 48 heures et l’effet de l’infiltration est retardé de quelques jours Deux infiltrations à quinze jours d’intervalle sont souvent nécessaires.

La chirurgie : il faut avoir recours à la chirurgie si les deux autres traitements sont inefficaces. L’intervention est réalisée sous anesthésie loco régionale en ambulatoire c’est-à-dire sans hospitalisation. L’intervention consiste à libérer le tendon. Cette ténolyse est réalisée en incisant longitudinalement la poulie A1 au niveau de la paume de façon à faciliter le passage du tendon. Cette intervention se fait par une tres courte incision en regard de l’articulation métacarpo phalangienne du doigt concerné en palmaire.

Après l’intervention il n’y a ni d’attelle ni rééducation et un simple pansement est conservé quelques jours. La récupération est généralement complète au bout de trois semaines. Le patient est encouragé à mobiliser immédiatement son doigt après la chirurgie.

 
Cicatrice pouce à ressaut
4 - LA MALADIE DE DUPUYTREN

La maladie a été décrite par le Baron Guillaume Dupuytren , elle est liée à un épaississement ,une rétraction et la dégénérescence de l’aponévrose palmaire moyenne. Il s’agit d’une structure plate comme une feuille de papier située sous la peau de la paume de la main et des doigts. Cet épaississement s’accompagne d’une rétraction qui limite l’extension des doigts et peut infiltrer la sous peau. Habituellement, la rétraction des doigts ne s’accompagne d’aucune douleur.

La maladie de Dupuytren est plus fréquente dans le nord de l’Europe et atteint plus souvent l’homme que la femme autour de 40 à 50 ans avec une fréquence de 4 à 10% dans la population générale, en France. Très souvent, un autre membre de la famille a présenté également la maladie. Certains médicaments ou l’alcool pourrait favoriser cette maladie. En plus des mains, elle peut toucher les plantes des pieds (aponevrosite plantaire ou maladie de lederrhos)..

SYMPTOMES CLINIQUES

La maladie de Dupuytren se caractérise par de signes liés à la rétraction de l’aponevrose palmaire et par conséquent des téguments. Ainsi on retrouve des cordes fibreuses, des brides digitales, palmaires ou digito-palmaire. Des nodules durs sous la peau et des dépressions en capiton cutané toujours dans la paume de la main.

Au départ le patient peut palper dans la paume de sa main un petit nodule sous cutané dur et indolore. Apres plusieurs années d’évolution sans traitement, les cordes sous cutanées vont apparaître et entrainer avec elles la rétraction progressive du doigt. Cette déformation se fait de façon lente et insidieuse si bien que le patient consulte souvent tres tard.

Il existe souvent des troubles trophiques cutanés avec un amincissement de la peau en regard des capitons et nodules.
Apres plusieurs années d’évolution, le patient peut devenir handicapé de sa main car la rétraction d’un ou plusieurs doigts entraine son inefficacité fonctionnelle.
 
 
 
 
La maladie de Dupuytren
L’atteinte commence par le 5e et le 4e doigt dans 75% des cas mais tous les doigts peuvent être atteints avec des lésions bilatérales dans 50% des cas.
Aucun examen complémentaire n’est nécessaire pour faire le diagnostic de maladie de Dupuytren.

TRAITEMENT

Un traitement ne doit être envisagé que si la rétraction empêche l’extension complète des doigts ou si la gène fonctionnelle est importante.
Les deux types de traitement sont : l’aponévrotomie et l’aponevrectomie chirurgicale qui seront détaillées dans le chapitre suivant.

L’aponevrotomie consiste à sectionner sans les enlever les cordes sous cutanées par des mini incisions. Celles ci peuvent se faire à l’aide d’un bistouri ou même une aiguille d’injection intramusculaire. Ce traitement est parfois utilisé des rhumatologues qui le pratiquent sous anesthésie locale dans leur cabinet.
Cette technique a l’avantage d’être simple et rapide mais ne s’adresse qu’au stades légers de la maladie et expose à la récidive pratiquement dans tous les cas nécessitant alors une chirurgie plus lourde.
 
5 - L’ENTORSE DU LLI DU POUCE

Le ligament latéral interne de l’articulation métacarpo phalangienne du pouce est très important dans les gestes de pince pouce index. Il permet la stabilisation du pouce qui est alors soumis à des fortes contraintes. Cette articulation a une faible amplitude et ne permet surtout que des mouvements de flexion extension sur quelques degrés.
Lors d’un traumatisme en valgus, le ligament peut être détendu (entorse bénigne) ou rompu (entorse grave).
L’accident le plus fréquent est celui de la dragone en ski. En effet, lors de chute à ski le pouce est retenu par la dragone entrainant le mouvement de valgus responsable de l’entorse.

SIGNES CLINIQUES

La douleur comme souvent est le maitre symptôme. Elle est située sur le trajet du LLI à la face interne de la MP. Parfois une petite ecchymose (suffusion de sang sous cutanée) peut être associée.

L’examen clinique recherche avant tout la laxité qui traduit la distension ou la rupture du ligament. Cette laxité se recherche en bloquant d’une main le premier métacarpien et en imprimant avec l’autre un mouvement latéral de valgus à la première phalange du pouce.

En cas d’entorse grave la laxité est manifeste et importante et ne nécessite pas d’autre examen pour faire le diagnostic. En cas de laxité douteuse il faut avoir recours à la radio de face de la MP en valgus forcé (ckiché dynamique).

Parfois sur le cliché standard de face on peut constater un petit arrachement osseux de la base de la première phalange traduisant la gravité de l’entorse et dans ce cas le cliché dynamique est inutile.

Rarement une IRM peut être nécessaire pour faire le diagnostic.

TRAITEMENT

En cas d’entorse bénigne le traitement est toujours orthopédique à bae d’immobilisation par un gantelet en résine ou en plâtre pendant une durée de 3 semaines.

Ensuite, une quinzaine de séances de rééducation sera nécessaire pour retrouver la fonction de l’articulation.

Lorsqu’un arrachement est constaté sans déplacement, le gantelet sera maintenu 4 à 6 semaines le temps de la consolidation du fragment. Si le fragment osseux est déplacé, le traitement chirurgical s’impose avec une mini ostéosynthèse par broche ou vis associée à une immobilisation de 4 à 6 semaines.

Dans le cas d’une entorse grave sans arrachement osseux, le traitement doit toujours être chirurgical en raison du fort risque de non cicatrisation du ligament à sa place , responsable de laxité chronique de l’articulation à long terme, de douleurs et d’arthrose.

La technique de réinsertion du LLI sera détaillée dans le chapitre chirurgie de la main.